Cela faisait deux nuits que Aurèl dormait dans la rue, cela était loin d'être agréable et gérable pour lui. Les nuits étaient beaucoup moins froides, mais cela signifiait que les gens sortaient de plus en plus. Il n'était donc pas facile pour lui de réussir à trouver plusieurs heures de sommeil de suite. Bien souvent il arrivait à dormir au plus deux heures avant de sursauter alors qu'on passait à côté de lui. Pestant de nouveau en sentant de personnes alcoolisées proche de lui, il ouvrit les yeux tout en s'étirant. Il n'était pas tard, à peine vingt deux heures. Néanmoins, cela faisait deux jours qu'il faisait de son mieux pour dormir. Serrant un peu plus son écharpe rouge autour de son cou, Aurèl se redressa sur son matelas pour tenir contre le mur derrière lui. Il devait rester éveillé encore un peu. Juste le temps que ces types passent. Cela n'était pas le moment de dormir. Il faut dire que Sang Hyuk lui avait fait peur lors d'une nuit. Maintenant qu'il avait pu lui mettre en tête que des créatures étranges pouvaient exister dans leur monde, il avait du mal à rester les yeux fermé quand on passait à côté de lui. Il se devait de surveiller les lieux et surtout attendre avant de se rendormir.


Pourtant, ces types semblaient avoir du mal à partir, ils c'étaient assis plus loin dans le caniveau pour discuter. Hum. Fouillant dans ses poches de pantalon, Aurèl trouva quelques pièces. Affichant un petit sourire, il se leva de son matela pour prendre la direction de la supérette non loin de son coin. Cela serait bien de prendre une boisson chaude. Rentrant dans la supérette, il salua le vendeur avant de se diriger vers les boissons chaudes. Un bon chocolat chaud et … Non, cela n'était pas bon de craquer pour autre chose. Il avait à peine de quoi manger demain des ramens instantanés. Allant payer il se dirigea vers l'eau chaude pour la verser dans son gobelet en plastique.


Peu après, il était de nouveau dehors. Ce bref instant, lui avait permis de changer son quotidien dans la rue. Retournant s'installer sur son matelas, il fixait du coin de l’œil le groupe d'homme, il n'avait pas spécialement confiance dans les hommes bourrés. Mais après plusieurs minutes, ils ne semblaient vraiment pas dangereux. Prenant dans ses mains sa boisson chaude, il souriait alors de sentir la chaleur se propager dans son corps. Cela était plaisant, souriant en coin, il se mit à boire tranquillement sa boisson tout en espérant pouvoir se rendormir prochainement. Son esprit virevolté dans ses souvenirs et il se mit à songer à son petit frère. Il espérait que ce dernier n'aura pas à se retrouver dans sa situation. Même s'il n'avait plus honte de sa sexualité, il ne voudrait pas voir son frère se faire rejeter de la sorte. Il fut surpris de voir un visage connu au coin de la rue. Il s'agissait d'un jeune homme qui venait parfois lui apporter son aide. Aurèl avait du mal à discerner pourquoi, mais il était plaisant d'avoir un peu de compagnie et surtout quelqu'un à qui parler un peu. Levant son bras pour lui faire signe, il affichait un petit sourire. «  Émeraude !  » Peut-être qu'il aurait le temps de parler quelques minutes avec lui. Même si vu l'heure, il avait peut-être juste l'envie de rentrer chez lui et se réchauffer.

Avoir un visage plaisant comme le sien est une aubaine pour le jeune homme. Il attire plus facilement les gens à lui, des potentiels clients pour le club d'host, des femmes comme des hommes qui demandent après lui. Émeraude est assez simple en son genre, il n'a pas besoin de faire des extra pour plaire à ces personnes aux moyens démesurés. Des riches, beaucoup de riche qui ne savent pas quoi faire de leur argent, si ce n'est se faire servir des bouteilles hors de prix par un adolescent aux yeux de biche. C'est de l'argent facile, il n'a qu'à discuter avec ses clients, remplir leurs verres et faire en sorte qu'ils consomment le plus possible. Il arrive parfois que quelques-uns désirent plus qu'un servir basique, mais le rouquin s'interdit ce genre de supplément. Il est host, pas prostitué. Il n'a aucune envie de tomber dans ce cercle vicieux et de s'attirer des ennuis plus gros que lui. De ce fait, il s'en tient à son métier de base, servir et tenir compagnie.

La soirée se termine bien assez vite pour lui qui n'a pas vu le temps passer avec les nombreux clients du club. Les uns après les autres, parfois plusieurs à la fois, Émeraude n'a même pas eu le temps de souffler cinq minutes, toujours demandé par quelqu'un. à la fin de son service, le garçon n'avait qu'un souhait, se changer et rentrer. Il a troqué sa tenue d'host pour un ensemble des plus simples, jeans et pull. Adieu l'allure idyllique du bellâtre et bonjour le look de l'adolescent dans la fleur de l'âge. Émeraude salue ses collègues avant de quitter le club, il fait attention de sortir par la porte arrière pour ne pas croiser d'autres clients et ne pas devoir rester plus longtemps que prévu. Les rues sont plus peuplés que d'habitude, maintenant que le froid a laissé place à des températures moins contraignantes. Le jeune homme se plaît à marcher le long des boutiques à peine éclairées ou ouvertes. Il est tard, la plupart des commerces sont fermés ou peu fréquenté. Émeraude n'a pas très envie de s'attarder, il trace sa route vers la demeure de ses parents, mais sa course est stoppée par une voix familière.

« Aurèl ? » Il est surpris de trouver le jeune homme ici, dans cette rue, à une heure si tardive. Dort-il dehors pour ce soir ? Ce n'est pas la première fois qu'il le croise dans ce genre de situation. à de nombreuses reprises il l'a aidé en l'invitant chez lui, dans l'une des chambres vides de sa maison traditionnelle. Il ne fait pas payer la location à ce garçon qu'il considère comme un ami. Ses parents n'ont rien contre l'idée d'héberger gratuitement Aurèl chez eux, après les explications de leur fils. Emeraude est quelqu'un d'altruiste, qui n'aime pas la misère du monde et ce que vivent certaines personnes. S'il pouvait, il aiderait davantage. « Qu'est-ce que tu fais là ? Tu dors ici ? » Demande-t-il en se penchant pour voir l'endroit d'où il est arrivé. Un coin à l'abri, mais ça n'empêche pas les gens de tourner autour ou de passer à côté. « Tu vas attraper mal dehors... Viens chez moi. » C'est une proposition que son interlocuteur ne peut refuser, surtout s'il ne parvient à bien dormir dans ce genre d'endroit où n'importe qui peut le déranger. Emeraude ouvre toujours sa porte aux personnes qu'il estime digne de confiance et cet Aurèl entre dans ses critères peu élevés. Il n'y a pas plus facile à vivre que le jeune humain, mais le sans-abri a déjà dû s'en rendre compte.